top of page

Conférence à Melbourne, Australie 1991

 

 

Chris Tippler : Mesdames et Messieurs,

Bonsoir, et bienvenue à tous. Je m’appelle Chris Tippler et j’aimerais juste proposer ce soir quelques mots d’introduction à Douglas.

Une vieille plaisanterie dit : " Quand je découvrirai le secret de la sagesse véritable, je vous le ferai savoir, s’il me semble encore important de vous le faire savoir. " Il est très rare de trouver des gens qui ont découvert la sagesse véritable et encore plus rare d’en trouver qui ont voué, comme Douglas Harding, toute leur vie à aider les autres à partager leur compréhension et leurs expériences. La vie de Douglas a été vraiment remarquable et je pense qu’elle mérite qu’on lui consacre quelques instants.

Douglas est né en 1909, en Angleterre, au sein d’une famille croyante très stricte. A vingt ans, il prit ses distances avec cette éducation pour suivre sa propre recherche, celle de la connaissance, qui fut l’objet de presque toute sa vie. Il enseigna les religions comparées pour l’université de Cambridge et écrivit un certain nombre de livres sur ce sujet, Au début des années 60, parut Vivre sans Tête, Une contribution au zen en occident, qui devint assez rapidement une sorte de livre culte pour les gens sincèrement intéressés par le zen et les expériences religieuses authentiques. Réédité plusieurs fois, ce livre est toujours sur la liste de ceux qui se vendent le mieux aux Etats-Unis. Certains d’entre-vous le savent peut-être déjà, vous le trouverez également dans les librairies d’Australie, aux éditions Penguin Arkana. Ces trois dernières années, Douglas fit paraître deux autres ouvrages qui sont des récapitulations parfaitement limpides et pleines d’humour de ses enseignements. Cela fait un total de... je ne sais pas combien, mais je pense environ 7 ou 8 livres dont certains ont été traduits en 7 ou 8 langues.

Douglas anime des ateliers en Grande-Bretagne, dans toute l’Europe et aux Etats-Unis. Il s’est également rendu en Asie. C’est la première fois qu’il vient en Australie. Il donne l’impression de voyager inlassablement et l’unique regret qu’il semble exprimer est de n’être pas assez sollicité. En outre, il exerça longtemps la profession d’architecte. On m’a dit qu’il est un très bon architecte et que son cabinet connut le succès en dépit du peu de temps qu’il semblait y consacrer, étant totalement voué à sa quête fondamentale.
Les organisateurs du programme australien lui demandèrent ce qu’il souhaitait voir ou faire. Il répondit : " Je ne demande pas à être diverti. Je ne suis pas un touriste avide. Tout me fascine. Je ne mange presque rien ", pardon, " je mange pratiquement n’importe quoi ! " ce qui est vrai ! " Je dors pratiquement n’importe où , mais je me lève horriblement tôt " ce qui est aussi exact.

Il y a trois semaines, il arriva en Australie avec pour tout bagage un petit sac dans lequel le manuscrit de son dernier livre occupait la plus grande place. Jusqu’à ce jour, il a donné des conférences et animé des ateliers à Brisbane, Lismore, Sydney, Canberra, et à présent à Melbourne. La semaine prochaine il sera à Adélaïde, puis en Nouvelle-Zélande, avant de s’arrêter brièvement chez lui en Angleterre en attendant de repartir animer des ateliers à Bologne en Italie.

Mesdames et Messieurs, si vous en avez encore la force après ce long discours, je vous prierais de souhaiter la bienvenue à Douglas Harding.

Douglas Harding : Merci Chris. M’entendez-vous au fond ? OK ? Bien.

Cela me fait vraiment plaisir d’être ici avec vous, ce soir. Bien que je sois en Australie depuis près d’un mois, c’est ma première... conférence... à Melbourne.
Est-ce bien une conférence ? Je ne sais vraiment pas quel nom lui donner. Atelier est trop sérieux. Conférence, trop intellectuel. Divertissement, trop frivole. Séminaire est ridicule. Mon projet pour ce soir est, grosso modo, d’abord de parler de ce que je souhaite partager, et j’espère que vous me suivrez bien; puis nous en viendrons à ce que nous appelons l’essentiel de la question.

Ce soir, l’essentiel ce sont les expériences auxquelles nous allons procéder. Ne soyez pas inquiets, elles sont très simples, très directes et nullement gênantes, mais elles sont le sujet principal de ce soir. Les mots manquent peut-être de profondeur, mais je présume qu’on ne peut s’en passer pour expliquer la signification de ces expériences, et celles-ci nous donnent accès à ce qui est central, crucial, à ce qui nous concerne chacun personnellement. Elles feront de chacun de nous sa propre autorité. Ne croyez pas un mot de ce que dit Douglas avant de l’avoir vérifié par vous-même, car vous êtes la seule autorité à propos d’une chose, et je suis la seule autorité à propos d’une autre chose. Et de quoi s’agit-il ? De ce que vous êtes dans votre propre expérience en tant que première personne du singulier du présent. Autrement dit, il s’agit de découvrir ce lieu d’où vous venez, à partir d’où vous regardez, ce qui est assis sur votre chaise en ce moment, qui vous êtes dans votre propre expérience de l’instant présent, sans intermédiaire, comment vous ressentez le fait de vous être produit dans ce monde.

Si vous êtes comme moi, vous passez le plus clair de votre vie à croire les gens sur ce qu’ils ne sont pas en situation de vous dire, ni de me dire : personne n’est allé là où vous êtes, excepté vous. Tous les autres sont trop loin : à un ou plusieurs mètres, un ou plusieurs kilomètres de vous. Vous seul êtes en position (et je prends cela au pied de la lettre) de dire ce que c’est qu’être vous-même en ce moment. Pendant une grande partie de ma vie, j’ai abrogé cette autorité : J’ai laissé tout le monde, là-dehors, me dire ce que j’étais ici. (Attention, je ne parle pas psychologiquement, métaphysiquement, religieusement, mais au sens physique le plus courant.) . Mais, il y a pratiquement un demi-siècle, pour une raison ou une autre, j’ai regardé. Je crois que c’était parce que Douglas me posait des problèmes effroyables, problèmes qui me furent d’un grand secours, car ils me poussèrent à me poser la question capitale : que suis-je ici, dans mon propre vécu, quand je mets en doute tout ce qu’on m’a dit et que je me demande ce que je suis à zéro centimètre de cet endroit ? Et j’ai fait une découverte que je vais vous avouer maintenant, non que Douglas soit un gars particulièrement intéressant, mais pour vous inviter à faire probablement une découverte semblable, en ce qui vous concerne, là où vous êtes. C’est une découverte étrange, mais tellement simple que je pense qu’elle n’est un secret pour personne : Je ne suis pas simplement différent de ce que les gens me disent , je suis, à tous points de vue, carrément l’opposé de l’image que l’on m’a donné de moi... le strict opposé. N’est-ce pas une chose étrange ?

Je crois en l’existence de deux mondes infiniment différents l’un de l’autre. Le premier est celui dans lequel on nous dit que nous vivons, un monde de faux-semblants, un monde déterminé par le langage, les coutumes et les conventions. Le langage participe à la construction de ce monde des apparences. Lorsque nous étions de tout petits enfants, nous ne vivions pas dans ce monde de convention, nous vivions dans le ‘monde tel qu’il est’ et nous l’aimions, tel qu’il se présentait, tel qu’il s’offrait à nous. Mais en grandissant, nous échangeons ce ‘monde tel qu’il est’, le monde véritable tel qu’il se présente, le monde de Dieu si vous préférez, contre le ‘monde des apparences’, le monde des faux-semblants humains. Et presque tous, nous vivons et mourons convaincus que le ‘monde des apparences’, le monde de convention qui nous a été transmis par nos parents, nos professeurs et le langage, est le monde véritable.

Pourquoi devrions-nous faire la distinction entre le ‘monde des apparences’ et le ‘monde tel qu’il est’ ? Eh bien, c’est mon expérience, (et n’en croyez pas un mot, vérifiez-le vous-même) c’est mon vécu que le ‘monde tel qu’il est’, tel qu’il m’est donné avant que je ne commence à le trafiquer pour le contrôler, pour avoir du pouvoir sur les autres et ainsi de suite, le monde tel qu’il m’est donné quand je suis assez candide pour oser regarder ce qui m’est présenté, est un tissu de bénédictions, un monde plein de grâces, un monde bâti selon un plan d’une fabuleuse beauté. Vous apprécierez la vérité de ce que je dis dans un moment. Et, réciproquement, je trouve que le ‘monde des apparences’ ou monde conventionnel, en lequel on nous demande de croire, est passablement mesquin, passablement horrible.

Certains d’entre-vous se souviennent sûrement d’un auteur remarquable, Thomas Traherne, ecclésiastique anglais du XVIIe siècle, mystique et poète. Il disait qu’il existe deux mondes : celui de l’homme et celui de Dieu. En fait, ce qu’il faut c’est sortir de l’un pour aller dans l’autre. Selon mon expérience personnelle, il a vu juste . Ce soir, avec votre permission, nous allons jeter un regard sur un autre monde, je dirais le monde de Dieu, si ce mot désuet ne vous dérange pas. (Je dois faire très attention quand j’utilise le mot Dieu. Je peux employer le mot ‘Bouddha’ jusqu’à ce que les poules aient des dents, mais je m’attire des ennuis quand j’emploie le mot Dieu. Remplacez-le par votre propre synonyme.) (rires)

Deux mondes, donc : Le monde réel, qui nous est donné, dont je suggère qu’il est un tissu de bénédictions, et le monde conventionnel dans lequel nous devons vivre. Nous devons certes entrer dans son jeu, mais ne le prenons pas mortellement au sérieux. Mortel est le mot juste. Pendant près de cinquante ans j’ai observé le monde ‘tel qu’il est’, le monde réel, et j’ai été stupéfié d’y faire sans cesse des découvertes. Même ici : J’arrive en Australie à l’âge vénérable de 82 ans et je découvre encore d’autres différences entre le monde réel, le monde de Dieu si j’ose dire, le monde ‘tel qu’il est’, et le monde conventionnel dans lequel nous nous condamnons à vivre.

Donc, ce soir, il s’agit d’être courageux, d’avoir l’audace d’être nous-mêmes et de dire au monde de s’occuper de ses oignons, car personne n’est en position de vous dire à partir de quoi vous regardez en ce moment, ce que vous êtes selon votre propre vécu immédiat. Je ne suis pas en position de vous dire à quoi vous ressemblez là où vous êtes. Je vais vous demander de décider par vous-même, sur la base des quelques petites expériences que nous allons faire ce soir, qui seront complétées demain, pour certains d’entre nous, par d’autres plus importantes, impliquant plus de technologie, mais elles ouvrent toutes des voies passionnantes vers le lieu que nous n’avons jamais quitté. Vous allez vérifier s’il en est bien ainsi, si vous avez été menés en bateau par l’habitude et le langage et peut-être trahis. Vous seul en serez juge. Ne laissez pas Douglas vous dire à quoi vous ressemblez là où vous êtes. Mais il va vous dire à quoi il ressemble ici, au cas où vous seriez dans la même situation étrange. Je dis et je le répète, selon mon expérience, ce que nous sommes vraiment, vraiment, vraiment est simplement fabuleusement heureux quand nous avons le courage de regarder nous-mêmes, par nous-même, pour nous-même.

J’ai reçu hier une lettre d’un ami de Californie qui citait Albert Einstein. Vers la fin de sa vie, Albert Einstein a dit qu’il n’existe qu’une seule question véritable : L’univers est-il propice ? Peut-on lui faire confiance ? C’est la grande question . J’ai trouvé, c’était à Canberra, je crois, un exemplaire du livre de Carl Rogers à propos du devenir personnel. Je respecte beaucoup cet homme. Il a dit quelque chose de très pondéré et que je trouve très juste. Il a dit : les faits sont bienveillants. Eh bien, vous jugerez si les faits sont bienveillants ce soir, et il s’agit bien de faits, de ce qui est assis dans votre chaise en ce moment !

Pourquoi devrions-nous examiner ce que c’est qu’être soi-même première personne du singulier du présent, à partir de quoi nous regardons, d’où nous venons ? Pour quelles raisons devrais-je m’assurer de ne pas vivre et mourir sans avoir jeté un coup d’œil à qui fait cela ? En voici une importante, je crois, qui devrait plaire à vos cœurs et à vos esprits : c’est la simple gratitude de se trouver là. C’est la dernière chose à laquelle on pense, n’est-ce pas : être simplement reconnaissant de se trouver là ? Vous savez, vous n’étiez pas obligé de vous produire, mais vous l’avez fait. Vous vous êtes produit, et je dis qu’il faut être vraiment froussard, peu entreprenant, (- oserai-je dire assez peu australien ? -) pour vivre et mourir en croyant sur parole ce que tout le monde vous dit sur ce qui s’est produit là où vous êtes sans jamais songer à consulter l’habitant de ce lieu. Personne, excepté vous-même, n’est en situation de vous dire ce que vous êtes, qui vous êtes. Et ce soir nous allons exercer cette autorité suprême. Et je suggère qu’en le faisant, nous goûterons quelques unes des bénédictions qui émanent de qui nous sommes vraiment, vraiment, vraiment. Donc, la première raison d’examiner cela est, je pense, la curiosité. Je veux bien être damné si je vis et meurs sans jamais regarder pour voir qui fait cela ! Ce ne serait pas digne de vous non plus, n’est-ce pas ? Quel défit ! Quelle opportunité !

Second motif : Ainsi que Chris l’a dit, j’ai enseigné les religions comparées. Par un hasard extraordinaire, avec des compétences minimales, car j’étais architecte, j’ai trouvé le moyen d’enseigner les religions comparées pour l’université de Cambridge. Je ne comprendrai jamais comment j’ai eu cette chance, mais c’était certainement un sujet qui me tenait à cœur. Et, en étudiant les grandes religions, j’ai découvert le cœur universel, ce qui était au centre de chacune d’entre elles, le cœur mystique, le véritable message, souvent renié, caché (des gens ont été grillés vifs pour l’avoir annoncé), mais toujours présent. Et ce que nous proposent ces cinq grandes religions est stupéfiant, à nous faire dresser les cheveux sur la tête ! Quel est ce message ? Plus proche de vous que vos mains, que vos pieds, que votre souffle, se trouve l’Origine du Monde ! Ce que vous êtes vraiment, vraiment, vraiment n’est pas un produit du monde, c’est l’Origine du Monde ! C’est ce que disent les Upanishads, les bouddhistes, les taoïstes, même le judaïsme. Un rabbin espagnol a dit : " Dieu est l’âme de mon âme. " Tous les très grands mystiques chrétiens le disent. L’islam aussi : " Allah est plus proche de l’homme que sa propre veine jugulaire. " Ne laissons pas nos vies s’écouler sans le vérifier. Si cela ne vaut rien, balançons-le. Si c’est vrai, prenons-le au sérieux faisons-en quelque chose. Qui vous êtes vraiment, vraiment, vraiment, selon eux, n’est pas un produit du monde, c’est l’Origine du Monde. Je pense que nous devons être suffisamment humbles, audacieux, sincères pour le vérifier. Paradoxalement, il vous faut une grande humilité pour être aussi grand que vous êtes. Pouvons-nous dévoiler et supporter cette grandeur ? Eh bien, je pense qu’on ferait bien de le faire, si l’on a quelque intérêt pour soi. Selon eux, plus proche de vous que tout le reste est l’Eternel, l’Eveil Eternel, la Conscience, la Réalité d’où tout provient. Mentiraient-ils tous ?

A mon âge, il devient urgent de tirer cette affaire au clair, n’est-ce pas ? Cela fait 82 ans que je regarde dans le miroir et chaque fois que je vois ce type, il est plus près de la mort. C’est un cas incurable ! Et ça fait 82 ans que ça dure... et si je suis lui, si je suis celui-là, ma parole, vous savez, je suis foutu. Le ‘monde des apparences’ dit : " ça c’est toi, dans le miroir ". Toutes les mamans et tous les papas savent que quand tout petits nous regardions dans le miroir, celui que nous voyions était notre ami ! C’était notre petit ami, pas nous-même. A cette époque, nous étions sensés et nous disions la vérité. Puis j’ai grandi, et ils me répétaient sans cesse : " C’est Douglas, c’est Douglas, c’est toi, c’est toi ! " J’ai gobé cette histoire, vous savez, (rires) et l’on aurait dû me mettre en garde. Au début, ce petit personnage dans le miroir, le petit Douglas était inoffensif derrière le verre, comme un spécimen de laboratoire. Lorsque vous avez un dangereux spécimen de laboratoire, vous le conservez dans un récipient en verre. Eh bien, petit Douglas était là, dans un récipient de verre. Mais il s’en échappa sous la pression du 'monde des apparences’ , grimpa le long de mon bras et envahit cet endroit-ci, en imagination, bien sûr. (Il dût se retourner en chemin, car il était à l’envers : il regardait par ici et je regardais par là.) Là-bas il n’était pas dangereux, ici c’est un parasite et les parasites drainent votre énergie. Ils vous affaiblissent et vous tuent. Il me semble que la grande hallucination, la grande absurdité du 'monde des apparences’, du monde conventionnel est de dire que je suis ici ce que je semble être là-bas. Comment est-ce possible ? Comment pourrais-je être ici, à zéro centimètre, ce que je parais être à deux mètres ?

En ce moment, vous avez l’apparence de Douglas, et elle est à votre entière disposition. Je veux dire qu’il est votre problème, que vous le subissez en ce moment. Vous avez mon apparence, et je vous jure qu’à tout point de vue, je suis ici le contraire de ce que je vous parais être. Dire : " Je suis ici ce que je parais être là-bas " n’est-ce pas la convention humaine la plus absurde et la plus ridicule ? Et ce n’est rien de moins qu’un suicide, car celui-là est incurable. Chaque fois que je le regarde, il est plus près de la mort. Si je suis cela, c’en est fait de moi ! C’est un objet mortel entre tous. Quand je le prends et le mets ici, le retournant, le trafiquant, c’est la mort qui le transporte le long de mon bras et le met ici, sur ces épaules. C’est un suicide. Mais, Dieu merci, ce n’est pas vrai, vous m’entendez ! Aussi je suggère qu’à notre retour chez nous ce soir, nous regardions dans le miroir pour voir comment nous ne sommes pas ! Je regarde dans le miroir et, Dieu merci, je ne suis pas comme cela ici ! C’est un assassinat de se prendre pour ça. Et nos esprits, nos cœurs répondent tous à ce message : notre apparence n’est pas ce que nous sommes. Votre apparence est merveilleuse, je l’apprécie énormément, mais, voyez-vous, elle s’en va, elle est temporaire.

La question est la suivante : " A partir d’où regardez-vous ? Qu’êtes-vous à zéro centimètres de vous-même ? " Et les grandes religions disent que, plus proche de vous que tout le reste, se trouve l’Origine du Monde. Dans un très beau passage, peu connu il me semble, le Coran dit : " L’homme est comme un mirage dans le désert. Quand vous l’approchez, vous le perdez et là où vous pensiez qu’il y avait un homme, vous trouvez Dieu. "

Certains d’entre-vous ont dû me voir à la télévision. Une émission plutôt lamentable. Je ne me souviens pas du nom du journaliste. Il m’a présenté comme un anglais excentrique. Eh bien, je pense qu’il s’est trompé : c’était lui 'l’excentrique’. Dans le 'monde des apparences’, nous nous 'excentrons’, nous vivons tous à environ un mètre cinquante d’où nous sommes, nous sommes sortis déjeuner (rires) comme le disent si pertinemment les américains. Dans le 'monde des apparences’ nous vivons tous là dehors (y compris Douglas), nous observant de là, imaginant notre apparence à travers les yeux des autres, de ceux de Marie, de ceux de Chris, et alors nous nous disons " oh là là, suis-je bien coiffé, suis-je apprécié, etc. ? " Je dis que l’art de vivre consiste à passer du 'monde des apparences’, du monde des hommes, du monde fratricide, au 'monde tel qu’il est’, le monde de Dieu, le monde dont je dis qu’il est un tissu de bénédictions... Tout ce que nous avons à faire est d’emprunter une voie spirituelle (en fait, je ne suis pas sûr qu’elle soit spirituelle). Vous avez tous entendu parler de voies, certaines sont très bonnes, la noble voie octuple ou d’autres, il existe toutes sortes de voies. Je suppose que le fait d’être architecte m’a rendu sacrément réaliste, je veux être concret sur ce sujet, je n’aime pas ce qui est flou. Je hais les abstractions. Je veux savoir de quelle sorte de voie il s’agit, où elle conduit, sa longueur et comment la suivre. Et je dis que pour rentrer Chez Moi à partir de qui je parais être, du 'monde des apparences’ au 'monde tel qu’il est’, je dois prendre la voie d’un mètre (devrais-je dire la voie non noble d’un mètre ?) jusqu’à qui je suis ici. Revenir à ce Chez Soi que nous n’avons jamais quitté est aussi simple que cela. Et les expériences que nous allons faire ce soir et demain consisteront à revenir Chez Soi. Ce personnage de la télévision avait tout faux. Mon affaire dans la vie est d’être centré et non ex-centré d’un mètre.

Donc, pour passer du monde fratricide qui nous détruit de tant de manières différentes, il faut simplement rentrer Chez Soi, en ce lieu que nous n’avons jamais quitté, regarder à partir de quoi nous regardons, être nous-mêmes. Shakespeare a écrit (vous connaissez ce cliché, Shakespeare n’a-t-il pas écrit de nombreux clichés ?!) : " Avant tout, sois fidèle à toi même, alors tu ne pourras tromper personne ". Shakespeare a dit autre chose, une merveille. Les gens l’écoutent, car c’était un homme vrai qui savait ce qu’il disait. Il a vendu la mèche dans une pièce nommée " Measure for Measure " : " Homme orgueilleux, revêtu d’une petite autorité éphémère, totalement ignorant de ce dont il est le plus assuré, son essence transparente, " ce qui signifie totalement ignorant de sa transparence, " comme un singe en colère, joue de tels tours face aux cieux qu’il en fait pleurer les anges. " A présent je puis vous dire, selon ce que je connais de Douglas, que j’ai le choix. C’est un choix radical : Ou bien, avec Shakespeare, je suis conscient de, je vis avec, je savoure mon essence transparente, ma transparence, ou alors je suis en grave danger de me conduire comme un singe en colère. Et ce n’est pas une plaisanterie. Vous pourriez me dire : " Eh bien, Douglas, je ne vous ai pas vu vous conduire comme un singe en colère ". OK, mais vous n’avez pas l’information intérieure que j’ai, moi. Et je vous dis que mon choix est sans équivoque : " Voir qui je suis ou me conduire comme un singé en colère ". Et que suis-je selon Shakespeare ? Je suis ce dont je suis le plus assuré, cette essence transparente, cette transparence, ici.

Pourtant je ne vous parais pas transparent, n’est-ce pas ? Douglas vous paraît très opaque, mais je jure que pour moi il est transparent. Et je vais maintenant vous demander de pointer vers ce que je vois comme étant votre opacité, et je pense que vous allez sans doute découvrir la transparence là où vous êtes, pour qui vous êtes. Etes-vous en train de regarder au travers de deux tout petits trous dans une boule de viande très, très opaque, parfois même plus très fraîche ? (rires) Deux trous ? Nous devons être honnêtes à ce sujet. Tirer cela au clair est une question de vie ou de mort. Shakespeare suggère que cette vision de qui nous sommes réellement est la chose la plus évidente au monde. Hélas, on nous clame que voir qui nous sommes vraiment, vraiment, est la chose la plus inaccessible, la plus mystérieuse, la plus difficile qui soit. Mais si vous lisez les véritables maîtres, vous verrez qu’ils disent que c’est la chose la plus évidente au monde. Tout ce que vous avez à faire est de regarder au bon endroit, et hop, vous êtes Chez Vous, heureux de Qui vous êtes. C’est précisément ce que nous allons faire dans une minute. Mais je ne puis trop insister sur cette évidence. C’est incroyablement évident, nous ne savons pas ce qu’est l’évidence tant que nous ne voyons pas qui nous sommes et à partir de quoi nous regardons. Tout ce que nous avons à faire, c’est regarder au bon endroit, cesser de compliquer les choses, et nous nous retrouvons Chez Nous à l’endroit que nous n’avons jamais quitté. Et je suggère qu’alors nous découvrons, je le répète, un monde tissé de bénédictions, un monde dans lequel l’amour est possible.

Dans le 'monde des apparences’, l’amour n’a pas la vie facile, car nous y sommes tous séparés, face à face, nous heurtant de front. L’affrontement est la règle et le nom du jeu que l’on joue dans le 'monde des apparences’. Mais il n’existe aucun affrontement dans le 'monde tel qu’il se présente’ : Ici, pour vous je suis vide, vous êtes vide pour moi et nous disparaissons réellement en faveur les uns des autres. Je vous jure que pour moi, sur l’évidence du moment, il n’y a absolument rien qui vous empêche de venir juste ici. Je m’arrête ici où ma poitrine disparaît. Je m’arrête ici, et au-dessus j’ai tous vos visages. Je perds une boule de viande très vieillissante et à sa place j’ai, en ce moment, tous vos charmants visages. Et je dis que nous sommes bâtis de cette façon pour aimer, nous sommes bâtis éclatés grand ouverts les uns pour les autres, n’est-ce pas ? Si vous regardez à partir de quoi vous êtes en train de regarder, avez-vous quoi que ce soit qui barre le passage à Douglas ? Avez-vous jamais été, dans votre vie, face à face avec qui que ce soit ? Cela n’a-t-il pas toujours été face à espace, là où vous êtes ?

A partir de quoi êtes-vous en train de regarder, en ce moment ? Deux petites ouvertures dans une boule de viande ? Ou est-ce vraiment ouvert, là ? N’êtes-vous pas construits ouverts ? En vérité, n’êtes-vous pas construits pour aimer ? Bien sûr, vous pourriez dire : " Eh bien, Douglas, tout ceci est très spirituel et charmant, mais ce n’est pas vrai, ce n’est pas scientifique. Il y a une chose ici, simplement vous ne pouvez pas la voir ". Je jure qu’il n’y a rien ici, et à quiconque douterait de ce que je dis, qu’en ce moment c’est totalement vide pour vous recevoir, je dis : " venez voir ". Et si la caméra là-bas voulait bien venir jusqu’à moi maintenant, elle me perdrait. Je devine que dans la caméra là-bas, il y a en ce moment la moitié supérieure de Douglas. Mais si elle se rapprochait, il y aurait seulement son visage . C’est ainsi que je vois cette fichue chose dans le miroir et c’est là sa place. En se rapprochant un peu plus, la caméra obtient l’image d’un nez, d’un oeil, d’une joue. Elle est encore très éloignée. Mais rapprochez-la encore et vous avez les détails de la peau... Et si vous l’équipez d’un appareillage optique et électronique très élaboré vous obtenez des images de cellules, de molécules, puis d’atomes qui ne sont pratiquement qu’espace vide. Donc, venez ici, et tout disparaît. Vous perdez ce dont vous vous approchez, quoi que ce soit. Allez vers un livre, jusqu’au point de contact, et vous le perdez, allez vers un visage, et vous le perdez. Et il y a une chose avec laquelle vous avez toujours coïncidé, dont vous n’avez jamais été éloigné, pas même d’un millionième de millimètre, c’est ce à partir de quoi vous êtes en train de regarder maintenant, cette supposée boule de viande que vous imaginez sur vos épaules. Vous n’avez jamais été ailleurs ; si vous remontez jusqu’à coïncider avec elle, vous retournez Chez Vous à l’endroit que vous n’avez jamais quitté, et vous découvrez qu’elle disparaît tout comme l’a dit Shakespeare. Vous êtes transparence, vide pour accueillir Douglas et vos amis en ce moment si vous regardez autour de vous . La grande duperie, la grande trahison est de dire : " Je n’ose pas regarder ce que je suis, je vais croire tout le monde sur parole et ces gens là-bas vont me dire ce que je suis ici, bien qu’ils ne soient pas en situation de me le dire ". Et c’est ainsi que je gobe cette fiction que je suis ici ce que je vous semble être là-bas. Moi je dis que je suis le contraire, à tout point de vue.

Alors, pour quelles raisons regarder ici ce soir ? Nous nous sommes produits, et nous n’allons pas mourir sans jeter un coup d’œil pour nous-mêmes à ce qui s’est produit. Deuxièmement, les grandes traditions affirment ce bonheur incroyable : qui vous êtes vraiment, vraiment est la Réalité Eternelle, l’Etre Impérissable duquel tout procède et auquel tout retourne. Et cela est accessible, visiblement, absolument évident quand on ose regarder. Voici donc quelques raisons de regarder pour voir qui nous sommes, et nous allons à présent faire quelques petites expériences qui toutes nous ramèneront Chez Nous. N’importe quel billet retour est un bon billet. N’importe quel chemin vers notre demeure est un bon chemin. Nous sommes excentrés, ce qui est absolument nécessaire pour rejoindre le club des humains, pour un temps tout au moins, vivant à l’extérieur de nous-même, nous regardant de là-bas. Mais la cotisation de membre de ce club est trop élevée. En fait, nous serons de meilleurs membres du club des humains si nous la retirons secrètement. Et quelle est cette cotisation ? Elle consiste à dire : je suis ici ce que je parais être aux gens là-bas. En d’autres mots, je suis fichu, je vais mourir.

Je le répète, je ne sais pas ce qu’est l’évidence tant que je n’ai pas regardé ce à partir de quoi je regarde. On a dit que voir qui l’on est vraiment, vraiment, est la chose la plus incroyablement difficile au monde. Mais en fait c’est incroyablement évident dès que l’on regarde au bon endroit. Mais on ne peut supporter l’évidence, la simplicité. Connaissez-vous l’histoire de la lettre volée, d’Edgar Alan Poe ? Brièvement : à Paris, vers le milieu du siècle précédent, la police était à la recherche d’une lettre très importante volée par un fort méchant homme. Les policiers attirèrent cet homme hors de son appartement qu’ils mirent à sac dans l’espoir de trouver la lettre. Ils transpercèrent les coussins avec de longues aiguilles, arrachèrent les plinthes, mirent les livres en pièces, sans résultat. Et pourquoi ? Parce qu’elle était sur la tablette de la cheminée ! Qui nous sommes vraiment, vraiment, est exactement comme ça, trop évident !

Avec combien d’yeux regardez-vous ? Je dis que 99 % d’australiens, - sans parler des autres personnes - vivent et meurent convaincus que, selon leur expérience de première main, ils regardent à travers deux tout petits trous dans une boule de viande. Deux. Avec combien d’yeux regardez-vous en ce moment, selon votre propre expérience ? C’est quelque chose de vraiment bizarre. Si je deviens fou et passe mon temps à mentir et à vivre dans un monde irréel, imaginaire, il vaut mieux que je me trompe à propos du monde extérieur. Mais si je me trompe au sujet du centre de mon univers, je suis réellement en difficulté. Il faut vraiment tirer au clair où est le centre de notre univers, afin de vivre à partir du lieu même où nous vivons. Si je dois devenir dingue, il vaut mieux que ce soit là dehors plutôt qu’ici. Je pourrais voir venir la Vierge Marie ou Napoléon là-bas, ce ne serait pas trop grave, mais mentir à propos de ceci, de moi-même, c’est fatal. Soyons sains d’esprit, honnête, ayons le courage de dire comment c’est là, en ce lieu d’où nous venons, d’autant que les grands sages au fil des âges ont dit que si nous vivons à partir de ce qui nous est donné, en toute évidence, nous recevrons des bénédictions sans fin et nous verrons que nous sommes construits grand ouverts les uns pour les autres. Nous donnerons à l’amour une chance. La vieille et pitoyable convention dit que nous nous affrontons l’un l’autre, face à face, nous heurtant de front. Regardez et voyez comment c’est exactement où vous êtes. Je suggère que vous regardez Douglas à travers cette merveilleuse transparence dont parle Shakespeare. Transparence. Vous ne regardez pas Douglas à travers deux petits trous dans un objet solide, mais à travers une seule fenêtre immense.

Soyons donc intrépides et faisons notre première expérience. Pour qu’elle soit bien faite et efficace, il est essentiel que vous ne regardiez pas Douglas. Regardez ce que je vous demande de regarder, c’est-à-dire vos lunettes si vous en avez, en les tenant à bout de bras. Et pour ceux qui n’en ont pas, confectionnez-en une paire comme je suis en train de le faire. Voulez-vous bien faire cela ? Veuillez regarder maintenant ces deux ouvertures, là-bas Deux ! A présent, mettez-les sur vous lentement, lentement . Puis baissez les mains. Maintenant, êtes-vous en train de regarder à travers deux trous, deux yeux ? En Orient il y a ce que l’on appelle le troisième oeil. Devons-nous aller au Japon, à Lhassa, ou Varanasi, ou au Mexique pour découvrir notre troisième oeil ? N’est-il pas disponible ce soir à Melbourne ? (rires) Un maître a dit que lorsque votre oeil sera unique vous découvrirez le Royaume et votre corps entier sera alors plein de lumière. Avons-nous jamais regardé autrement qu’avec cet oeil unique ? A-t-il un cadre? Cet oeil par lequel nous regardons maintenant ne s’étend-il pas à l’infini ? Pouvez vous compléter cette expérience en regardant le plafond - pas moi ? et tracer simplement comme je le fais le contour de la fenêtre à travers laquelle vous regardez - sans heurter votre voisin ? jusqu’à l’endroit où vos mains disparaissent. Pouvez-vous faire cela, simplement tracer le contour de votre oeil unique ? Avez-vous jamais regardé autrement qu’à travers cela ? Trouvez-vous un cadre ? Cela ne s’étend-il pas à l’infini ? Voici un moyen de rentrer Chez Vous. N’importe quel chemin conduisant Chez Soi est un bon chemin, n’importe quel billet pour Chez Soi est un billet valide. N’êtes-vous pas en train de regarder à travers ce que Shakespeare appelait votre essence transparente ? En fait, la fenêtre n’a ni verre ni cadre. N’êtes-vous pas simplement cette fenêtre ? Et, vous savez, cette fenêtre ne se brisera jamais, il n’y a là rien qui puisse se briser. A qui appartient cet oeil ? Le petit gars dans le miroir qui apparemment regarde par deux petits trous est fichu ! Pour celui qui regarde à travers cette vaste fenêtre sans cadre, il n’y a rien ici qui puisse périr. Ce verre est incassable, car il n’existe pas. Tandis que vous regardez à travers cet espace dans lequel le monde se produit, vous vous sentirez peut-être relié à votre enfance, quand vous étiez exactement ainsi, regardant à travers cet espace. Et vous verrez que vous ne m’affrontez absolument pas en ce moment, vous ne mettez aucun obstacle entre vous et moi, vous êtes grand ouverts pour Douglas, comme Douglas l’est pour vous.

Actuellement, dans le 'monde des apparences’, ou monde conventionnel, nous sommes construits pour la méfiance, pour tous les malentendus possibles, les problèmes, le manque de communication. Nous faisons la vie dure à l’amour. L’essence de l’amour n’est-elle pas de disparaître en faveur de l’être aimé ? Nous savons tous cela. Cela peut sembler plutôt sentimental, mais il est absolument vrai que dans le 'monde tel qu’il est’, le monde qui nous est donné, le monde véritable, nous mourons les uns pour les autres. Que, par l’imagination, je regarde Douglas à partir de là-bas, tel que vous le voyez, ou que j’observe le gars dans mon miroir, celui-ci va vers la mort ; il n’est pas encore mort, mais il en prend le chemin. Mais quand je fais pivoter mon attention vers ici, c’est comme une flèche ou une balle de fusil qui me liquide ici, totalement, il ne reste rien à part la conscience. Et ce n’est pas parce que je suis un bon gars (Douglas n’est pas un très bon gars), mais nous sommes bâtis, pour ainsi dire, pour donner notre vie les uns pour les autres, pour disparaître les uns en faveur des autres. Vous me direz que ce n’est pas la véritable mort. Je pense que cette mort est plus réelle que celle que nous nommons ainsi, car quand Douglas mourra, les pompes funèbres auront à faire à des restes peu avenants. Mais il n’y a rien de tout cela quand vous rentrez Chez Vous, et redevenez qui vous êtes. C’est une mort véritable, suivie d’une résurrection. Un maître a dit : " Il n’existe pas d’amour plus grand que celui d’un homme qui donne sa vie pour un ami ". Je dis que nous sommes bâtis sur ce magnifique modèle, et si nous vivons en conséquence, nous donnons à l’amour sa chance, plus qu’une chance. Nous vivons dans un monde riche de bénédictions . Nous avons atteint le lieu où la mort ne peut entrer. Nous ferons demain des expériences à ce sujet, mais permettez-moi de mentionner simplement ceci : Je regarde dans le miroir et vois Douglas âgé de 82 ans. C’est un mourant. Et je porte le miroir jusqu’ici - nous ferons cela demain - et avant qu’il ne soit ici Douglas a entièrement disparu. La mort est là-bas et tandis que j’approche le miroir de moi, le visage disparaît. Il s’estompe et ne peut venir ici. Un poète, dont vous vous souviendrez, posa un jour une question : " oe mort, où est ton dard, ô tombe où est ta victoire ? " Je dis là-bas, elle ne peut venir ici, car ici nous sommes grands ouverts dans cet espace merveilleux dont parle Shakespeare, cette transparence.

Voici une autre petite expérience : Montrer du doigt. Nous avons ici un très bon instrument pour nous amener Chez Nous à l’endroit que nous n’avons jamais quitté. Nos parents nous ont dit qu’il était mal poli de montrer les gens. Du doigt. Votre maman ne vous a-t-elle pas dit cela ? Ca rend les gens mal à l’aise. Eh bien, ce que vous êtes vraiment, vraiment adore absolument être désigné du doigt, et nous allons pointer notre index dans cette direction et voir ce que c’est. C’est l’endroit le plus négligé de tout l’univers. Je crois qu’il est plus ignoré que les satellites autour de Vénus, que les trous noirs et les galaxies. Cet endroit est incroyablement oublié, négligé, réprimé et c’est stupéfiant que nous puissions nier à tel point le centre même de notre vie. C’est précisément vers ce entre que nous allons pointer notre index.

Mais commençons par pointer vers quelque chose d’autre. Et, pendant cette expérience, ne regardez pas Douglas. Regardez votre doigt et ce qu’il désigne. Veuillez donc désigner le plafond. Vous allez voir que votre doigt désigne quelque chose. Maintenant baissez votre doigt et désignez le mur en face et vous allez voir que votre doigt désigne encore quelque chose, un mur . Baissez maintenant votre doigt un peu plus et désignez Douglas, tandis que je vous désigne. Vous pointez maintenant le doigt vers une chose nommée Douglas. Maintenant baissez un peu plus le doigt et désignez le sol au niveau de vos pieds. Voici donc le sol. Désignez maintenant ce que vous pouvez voir de vos jambes, qui se limite sans doute à vos genoux. Vous avez donc un doigt et vos genoux. Deux choses. Désignez maintenant votre estomac. Doigt, espace, estomac. Ne me regardez pas, regardez votre doigt et ce qu’il désigne, c’est à dire votre estomac. Montez maintenant votre doigt et désignez votre poitrine. Vous êtes encore en train de désigner quelque chose. Montez maintenant votre doigt un peu plus et désignez ce qui est au-dessus de votre poitrine. Que désigne votre doigt maintenant ? Désignez ce qui est en train de regarder en ce moment. Vous êtes l’autorité. Je pense que vous n’avez jamais désigné cet endroit en y prêtant attention. N’est-ce pas incroyable ? N’êtes-vous pas en train de désigner l’espace permettant au monde de se produire, de désigner cette vaste fenêtre sans cadre ? Et la vue de la fenêtre n’est-elle pas pleine de tous ces gens dans cette salle ? Je vous prie, avant de baisser le doigt, regardez vraiment ce qui se trouve au centre de votre univers.

Vous pouvez maintenant baisser le doigt. N’est-ce pas le lieu le plus délaissé de tout l’univers ? N’est-il pas essentiel de tirer cela au clair, d’être notre propre autorité à propos du lieu d’où nous venons, de qui nous sommes vraiment, vraiment ? Et je suggère que vous êtes espace infini, transparence impérissable, capacité sans frontière au sein de laquelle tous ces objets périssables apparaissent et disparaissent, que vous êtes l’exact opposé de ce que vous semblez être. Vous paraissez compact, je pense que vous avez vu que vous étiez transparent. Vous paraissez avoir deux yeux, et je pense que vous avez vu que vous n’en avez qu’un seul. Vous paraissez petits, tout petits, et je pense que vous verrez que vous êtes sans limites. Je pense qu’à tous points de vue vous êtes l’opposé de ce qu’on vous a dit, et qu’ayant accepté l’avis de tous à ce sujet excepté le vôtre, vous avez, ainsi que je l’avais fait, tout vu à l’envers. Et, comme moi, vous avez rejeté un monde de bénédictions dans lequel l’amour est possible, dans lequel nous sommes construits pour l’amour et non pour la mort, et pour être qui nous sommes vraiment, vraiment, de toute éternité.

J’ai une autre expérience à faire, ensuite je montrerai comment utiliser tout ceci, comme c’est pratique, comment vivre à partir de là lorsque nous quitterons cette salle. Une expérience de plus qui répond à une question que beaucoup d’entre vous se sont posée, j’en suis certain : " Ceci est terriblement visuel. Douglas, comment le montreriez-vous à un non-voyant ? Et si ce n’est accessible qu’aux voyants, ce ne peut être bien profond ". La dernière expérience de ce soir permettra de vérifier si ce dont je parle est accessible aux autres sens que la vue. Mais, une fois encore, vous êtes la seule autorité, ne croyez pas un mot de ce que dit Douglas. Je poserai des questions et vous devrez fournir vos propres réponses, silencieusement, bien sér. Nous allons donc tous fermer les yeux et les garder fermés.

A présent, les yeux clos, exerçant votre propre autorité, osant être qui vous êtes, et vous fiant à l’évidence de l’instant présent, quelle forme avez-vous ? Avez-vous une forme quelconque maintenant ? Etes-vous limité ? Selon l’évidence de l’instant, quelle est votre taille ? Combien avez-vous d’orteils ? Ne pourriez-vous pas actuellement prendre n’importe quelle forme ? Lorsque nous étions petits nous jouions à être un avion, un train, un lion... Il nous était tellement aisé de prendre toutes les formes que nous imaginions. C’est certainement parce qu’en fait, dans notre expérience de première main, nous n’avons pas de forme. Avez-vous des limites, des frontières ? Y a-t-il une interface quelconque entre vous et l’environnement, un endroit où vous vous arrêtez et où le monde commence ? Selon l’évidence de l’instant, ne débordez-vous pas plutôt dans cet espace immense, immense? La fenêtre, peut-être la nuit, mais toujours sans cadre, sans aucune frontière ? N’êtes-vous pas capacité infinie, selon l’évidence de l’instant ? Si vous le souhaitez, vous pouvez nommer cette capacité silence. N’êtes-vous pas maintenant silence permettant aux sons de se produire et de disparaître, silence infini, sans limites, impérissable ? Les sons périssent, sans aucun doute, mais le silence peut-il périr ? En ce moment, la capacité que vous êtes contient toutes sortes de sensations, chaleur, pressions, chatouillements, goûts, douleurs, souffrances et ainsi de suite. N’êtes-vous pas à présent un espace éveillé, impérissable, dans lequel ces choses périssables que nous nommons sensations vont et viennent ? Et de même que les pensées surgissent, s’épanouissent et disparaissent, les sensations apparaissent pour un temps, s’épanouissent et meurent dans cette capacité éveillée, illimitée, impérissable. N’êtes-vous pas cela maintenant ? Vous êtes l’autorité. Osez à présent être vous-même.

Selon l’évidence de l’instant présent, quel âge avez-vous ? Quelle est votre nationalité, votre sexe ? Les yeux fermés, sans avoir recours à la mémoire ni à l’imagination, selon ce qui vous est donné en cet instant, quelle est la couleur de votre peau, sans parler de votre emploi, de vos nom, adresse, numéro de téléphone, tout ce bazar, cette image de soi tellement compliquée que vous avez construite à juste titre au fil des années ? La vie implique l’édification de cette image, mais que lui est-il arrivé maintenant ? Est-elle disponible maintenant ? Pouvez-vous la trouver maintenant ? Tout ce bazar n’appartient-il pas au passé plutôt qu’au présent ? Selon l’évidence de l’instant présent, qui êtes-vous, qu’êtes-vous ? Vous est-il possible de dire ce que vous êtes maintenant ? Selon l’évidence de l’instant présent, que reste-t-il de tout le bazar que vous et moi avions construit, de cette image immensément compliquée de notre personnalité, de notre humanité ? Que lui est-il arrivé ? Que pouvez-vous dire à présent à votre sujet ? Selon l’évidence de l’instant présent, pouvez-vous dire " je suis ceci, je suis cela ou je suis autre chose ? " Je suggère que si vous êtes vraiment dans l’évidence de l’instant présent, vous êtes dans l’incapacité de le dire. Mais êtes-vous détruit ? Etes-vous incapable de dire " je suis " ?

Mais attendez... " Je suis ", quel nom ! A qui appartient-il ? Toutes les grandes religions ont dit " plus près de vous que tout le reste, plus réellement vous que tout le reste, est Celui Qui Est, dont je nom est 'Je Suis’ ". Reconnaître cela n’est pas de l’orgueil, mais de l’humilité, sinon nous prétendons exister par nous-mêmes. Je dis alors : Douglas est, Marie est, Chris est, Carol est. C’est cela l’orgueil. La véritable humilité est de dire : " pour autant que je suis, je suis Celui qui Suis ". Le nom de celui-la est " Je Suis " et c’est un nom formidable. Vous êtes l’autorité.

Vous sentez-vous bien d’avoir perdu tout l’échafaudage humain que vous aviez construit, cette image compliquée de soi ? Vous sentez-vous bien après ce nettoyage de printemps, ou êtes-vous irrité, avez-vous l’impression d’être diminué, d’arriver dans un pays insolite, étranger ? Ou bien, au contraire, ressentez-vous un grand soulagement, le soulagement d’être rentré chez vous ?

Qui êtes-vous, maintenant, dans votre propre vécu de première personne du singulier, du présent ? Je suggère que vous êtes celui qui est absolument impérissable, celui qui est l’amour même, celui qui donne sa vie pour son ami. Non pas parce que vous êtes quelqu’un de religieux, de spirituel, une personne psychologiquement développée, ou bien un maître ou autre chose, mais parce que vous êtes suffisamment simple, humble, pour être infiniment grand. Selon l’évidence de l’instant, qui êtes-vous maintenant ?

Et quand nous ouvrons notre Oeil, le décor de notre Chez Soi devient plus saisissant, plus coloré, mais notre nom principal demeure ce nom extraordinaire, le nom que nous ne perdrons jamais.

Voilà la conclusion de nos petites expériences. Nous allons en faire bien d’autres dans les deux jours qui viennent, mais je promets à ceux qui, pour une raison quelconque, ne pourront pas venir qu’ils n’auront rien manqué d’essentiel. Douglas a vendu la mèche ce soir. Demain nous allons certainement approfondir les conséquences et les développements de ce que nous avons découvert ce soir. Mais ceux qui ne viendront pas ont néanmoins expérimenté ici tout ce dont il s’agit. N’importe quelle route pour rentrer Chez Soi est une bonne route, quel que soit le moment.

Pendant le restant de la soirée je voudrais parler de l’aspect pratique de tout ceci. A quoi cela sert-il ? Cela nous aide-t-il dans notre vie ? Quel intérêt à part le divertissement, l’amusement, le plaisir de rentrer Chez Soi ? Comment cela nous aide-t-il en fait à mieux fonctionner ? Je ne sais ce qu’il en est pour vous, mais moi, je pense que vivre à partir de la vérité de Qui nous sommes vraiment devrait mieux fonctionner que vivre à partir d’un tissu de mensonges. Vivre à partir de la vérité de qui nous sommes doit forcément être plus pratique à tous les égards. Laissez-moi vous donner quelques exemples de la façon dont votre vie se déroulera mieux, je pense, si vous vivez consciemment à partir de ce que nous avons vu ce soir, si vous le mettez en pratique. Car nous devons le mettre en pratique. Rentrer Chez Soi une seule fois, ce soir, c’est très bien, mais ça ne va pas changer nos habitudes. Cela ne changera pas notre vie tant que nous ne retournerons pas sans cesse Chez Nous, tant que ce ne sera pas naturel d’être naturel, et tant que nous ne vivrons pas dans le monde 'tel qu’il est’ en étant qui nous sommes et en cessant de nous soumettre au monde des apparences dans lequel nous devons encore continuer de vivre. Laissez-moi simplement vous indiquer une ou deux choses réalisables que j’ai remarquées dans ma vie et dont je n’ai pas encore parlé. Je suggère que vous les essayiez pour voir si ça marche pour vous.

La première concerne l’énergie. Je vous ai déjà parlé du petit bébé dans notre miroir, là-bas, l’ami de notre petite enfance. Lorsque nous avons grandi, il ou elle s’est échappé du récipient de verre, a rampé ici et nous a parasité. Oui, vous avez été, vous aussi, parasités par cette chose dont la véritable place est là-bas. Les parasites pompent notre énergie et nous tuent. Cela signifie que si nous voulons de l’énergie, nous devons voir clairement qui nous sommes ici et renvoyer ce visage à sa place dans le miroir. Autrement dit, cela consomme une quantité considérable d’énergie, c’est incroyablement fatigant d’entretenir l’hallucination d’une boule de viande ici pour barrer l’accès aux gens. Je dois non seulement construire cette fiction, mais je dois continuellement l’adapter à chacun de vous. Je dois la modifier tout le temps. N’est-ce pas incroyablement fatigant ? Vivons à partir de la vérité et il y a de fortes chances que nous ayons plus d’énergie. Halluciner est fatigant. Et lorsque j’hallucine quelque chose en plein centre de mon monde, c’est désespérément fatigant. Donc, si nous voulons de l’énergie, essayons de vivre à partir de Qui nous sommes vraiment, vraiment, et non de ce les autres disent que nous sommes. Vivez à partir de l’essence transparente de Shakespeare, de la transparence, de la fenêtre sans cadre, du " Je Suis " impérissable, et vous aurez beaucoup plus d’énergie. Je ne devrais pas en parler, mais mes amis Australiens ont fait beau-coup travailler Douglas, et à 82 ans j’ai vraiment besoin d’énergie, sans quoi on devrait m’amener ou m’emporter d’ici sur une civière. Je ne plaisante pas. Si vous voulez de l’énergie, dites la vérité sur Qui vous êtes vraiment, vraiment. Notre véritable nature est une source d’énergie. Vérifiez-le vous-même. Le plus drôle, c’est que nous vivons tous à partir de Qui nous sommes vraiment ! Chacun de nous dans cette salle le fait bien. Simplement, nous ne remarquons pas que nous le faisons bien. Je veux dire que personne ne pourrait vivre à partir de cette boule de viande, dans les interstices obscurs, gluants, humides de cette chose vieillissante. De toute façon, personne ne pense cela, pas même les pensionnaires d’un asile d’aliénés. Nous vivons tous à partir de Qui nous sommes vraiment, vraiment, n’est-ce pas ? Le seul problème c’est qu’on a fait pression sur nous pour nous faire dire : " Je suis ici ce que je parais être aux gens là-bas ". Ce que nous devons faire, c’est avoir le cran de dire : " Occupez-vous de vos propres affaires, je vais être Qui Je Suis. Vous vous occupez de mon apparence, moi, je m’occupe de ma réalité ". N’est-ce pas simple ? Nous le faisons tous bien, nous vivons tous à partir de qui nous sommes. Le réaliser donne de l’énergie.

J’en viens maintenant à l’amour. Les relations personnelles sont essentielles dans notre vie. Nous sommes tous concernés par ce problème : comment échanger avec les personnes que l’on aime et avec celles que nous n’aimons pas tout à fait autant que nous le devrions ? Je dis : " Donnons une chance à l’amour en disant la vérité ". Nous sommes absolument grands ouverts les uns pour les autres ! Glassnost ! Tout ce que nous avons à faire, c’est de regarder et de voir cela, et lorsque nous vivons consciemment à partir de notre vaste ouverture, nous donnons une chance à l’amour Nous vivons tous à partir de cela. Il ne s’agit pas de changer quoi que ce soit. Voyez-vous, nous sommes tous d’accord que quelque chose a mal tourné. Il y a deux choses que nous pouvons faire : Nous changer nous-mêmes, nous prendre en main et entreprendre toutes sortes de thérapies et de traitements pour améliorer nos vies. Vous pouvez essayer, mais ce n’est pas ce dont je parle. Je ne parle pas de nous améliorer. Je parle de nous accepter tels que nous sommes vraiment, vraiment, en voyant clairement comment nous vivons de toute façon. Nous découvrons alors que nous sommes construits grands ouverts les uns pour les autres, construits pour aimer. A votre retour chez vous, regardez ceux qui vous sont chers. Le choix est simple : allez-vous mentir et en faire un affrontement, ou allez-vous dire la vérité, dire ce qui est, c’est-à-dire que vous êtes grand ouvert ? Allez-vous être face à face ou face à espace ?

Je vais demander à mon cher ami Chris, responsable de la présence de Douglas ici, de s’approcher. Maintenant, regardez-nous en train de nous regarder l’un l’autre : De votre point de vue, Chris et moi-même nous nous affrontons, n’est-ce pas ? Il y a là une boule de viande jeune, fraîche, et une autre ici, rassie. Elles sont séparées d’environ deux mètres et nous nous affrontons. Chris, est-ce la même chose pour vous ?

C.T. Je dois dire que non, Douglas. Depuis environ quatre semaines ce ne sera jamais plus pareil. Je découvre une chose des plus remarquables. Ce que je regarde vraiment est Douglas, mais d’où je semble regarder est simplement espace pour Douglas et c’est pour moi un changement extraordinaire dans ma façon d’être. C’est réellement magnifique.

 

D.H. Et je pense que nous pouvons dire que nous échangeons nos visages.

C.T. Je suis certainement plein de votre visage. Je peux voir ces bras, je peux voir ces mains, je peux voir la scène entière là, mais ici il y a seulement espace pour ce qui se passe.

D.H. Alors, Chris, est-ce la vérité de dire que nous sommes réellement construits pour aimer ? Est-ce exact ?

C.T. Oui, et cela me fait une peur bleue.

D.H. Pourquoi ? Pourquoi ?

C.T. Une des choses que je découvre quand je me laisse pénétrer lentement par ceci et quand je me laisse aller à cela, c’est une tendance à vouloir simplement embrasser pratiquement tous les gens que l’on rencontre. Et, Douglas, j’ai cette tentation effrayante en ce moment. Il faut s’y habituer. Je suis encore en train de m’y adapter. Il y a un certain nombre de personnes que ma femme ne serait pas particulièrement enchantée de me voir embrasser. Une des caractéristiques de cela c’est - on est tellement vide pour ce qui se passe qu’il n’y a simplement pas de distance, pas d’intervalle, pas de séparation. Ce n’est pas du tout une expérience mystique, c’est simplement la vérité, notre façon d’être.

D.H. Magnifique. Merci Chris. Donc disons la vérité et donnons à l’amour sa chance. Le monde est réellement un monde merveilleux, conçu sur un modèle fabuleusement beau, dans lequel l’essentiel est l’amour, parce que chacun de nous est construit ouvert pour le reste. Dans le monde véritable, l’amour n’a pas seulement une chance, l’amour est tout ce dont il s’agit. Je ne suis pas en train de parler d’effusions sentimentales, je parle de vivre à partir de la vérité et voir que nous sommes effectivement bâtis ainsi. Les sentiments viendront, si nous disons la vérité à propos de ce que nous voyons. La vision d’abord, l’amour ensuite. Le grand poète italien Dante dit, dans la 'Divine Comédie : " Le bonheur vient de la vision, pas de l’amour qui vient ensuite ". Disons la vérité à propos de ce que nous voyons et l’amour juste se présentera et aura sa chance.

C’est le second résultat que nous pouvons raisonnablement attendre d’une vie à partir de Qui nous sommes vraiment, vraiment. Mais nous devons mettre cela en pratique, Cette pratique est une méditation pour la vie courante, pour la place du marché. Il en sera ainsi quand vous partirez d’ici et direz la vérité dans votre voiture, car vous découvrirez que celui que vous êtes vraiment, vraiment, n’a jamais bougé d’un centimètre. Si vous êtes espace sans limites pour accueillir le monde, l’espace sans limites ne court pas ça et là dans Melbourne. Vous montez en voiture, vous dites la vérité et vous vous amusez, car cette sorte de méditation est amusante, et on la pratique bien plus volontiers que l’autre sorte de méditation, tellement ennuyeuse. Vous montez dans votre voiture et dites la vérité. Je suis venu en voiture de Brisbane et j’irai de même à Adélaïde. Et je ne bouge jamais d’un centimètre. C’est l’Australie qui se déplace. C’est merveilleux. L’Australie danse. Lorsque vous étiez tout petit, vous disiez la vérité. Votre Papa vous emmenait en voiture, et vous regardiez simplement les poteaux télégraphiques passer, les arbres défiler, les maisons pivoter, le bétail courir ça et là dans les champs et les kangourous faisant je ne sais quoi. . L’Australie dansait. C’était le monde 'tel qu’il est’. Puis le monde 'tel qu’il paraît’ l’a remplacé. Que s’est-il passé ? L’Australie, tristement, s’est figée, immobile. Alors, où est passée toute cette agitation ? A mon sens, elle est entrée ici, j’ai perdu ma paix intérieure, ma tranquillité et suis devenu agité. Maintenant enfin, quand je monte en voiture, je renvoie l’agitation dans le monde, je retrouve la tranquillité que je n’avais jamais vraiment perdue et l’Australie danse, c’est tellement beau, tellement amusant. Mettre ceci en pratique est amusant et c’est toujours possible. Tout ce que je fais en hallucinant quelque chose ici est comparativement mal fait. Que j’écrive un livre, fasse la vaisselle ou fasse semblant de faire le ménage (ce qui m’arrive rarement), quoi que
je fasse, si je le fais à partir de Qui je suis vraiment, vraiment ici, à partir de l’espace, c’est mieux fait et je dirais même que c’est fait avec un certain plaisir. Faire à partir de ce lieu signifie mieux faire et y prendre beaucoup plus de plaisir.

Faire quoi que ce soit à partir de la boule de viande imaginée gâche le travail. Autrement dit, l’essentiel n’est pas seulement de voir qui je suis ici, mais de lui faire confiance. En fin de compte, c’est une question de confiance, d’abandon à Qui je suis vraiment, vraiment. Ce petit gars dans le miroir n’a pas de ressources, pas de profondeur. Le petit Douglas, là, est peu convaincant. Parier sur cette petite chose autour de laquelle s’organise l’ego, c’est tout perdre, pardi. Il me laissera toujours tomber. Si ce que je vous ai dit ce soir était venu de lui, j’aurais été pitoyable et désespérément ennuyeux pour nous tous. La seule façon de faire un travail au mieux de nos capacités, c’est de le faire à partir de Qui nous sommes vraiment, vraiment. Cette ressource qui est la nôtre est infinie. Douglas me laissera toujours tomber. Celui que je suis ici, la transparence éternelle est un puits qui ne tarit jamais, qui ne me trahit jamais. Il ne me donne pas ce que je veux, il me donne ce dont j’ai besoin. Mais je répète : " n’en croyez pas un mot, vérifiez-le ". Tout ce que je puis dire, c’est que c’est ainsi pour moi : faire confiance à Qui je suis vraiment, vraiment, et renoncer à essayer de faire confiance au petit Douglas dans le miroir.

Comment maintenir cette vision ? J’ignore comment vous le ferez et combien d’entre vous le voudront. Si c’est valable, ça devrait sans aucun doute être compatible avec tout ce que vous trouvez utile, votre méditation, votre thérapie ou votre pratique spirituelle : Comment la maintenir, si vous le désirez ? Eh bien voici un ou deux tuyaux supplémentaires pour conserver entretenir cette vision de Qui nous sommes vraiment, vraiment, en y revenant encore et encore jusqu’à ce qu’enfin cela devienne naturel d’être naturel. Car c’est bien le sujet de ce soir, être simplement naturel, et non simuler, c’est tout. Comment rester naturel ?

Tout d’abord, il est très utile d’avoir des problèmes. Non pas des problèmes désespérément graves, mais de ceux qui sont suffisamment sérieux pour me ramener à l’endroit où il n’y a aucun problème, car Qui je suis vraiment, vraiment est libre des problèmes C’est vraiment à partir de cette zone sans problème que je vis dans le monde où est Douglas. Douglas, c’est des problèmes. Tout comme le monde, il fonctionne avec des problèmes. Avoir des problèmes là-dehors me ramène au centre sans problème. Donc, jusqu’à un certain point, avoir des problèmes est une bonne chose, à condition que vous les laissiez vous ramener à la région libre de problème, libre de stress. Les choses et le monde fonctionnent au stress, comme les voitures roulent à l’essence. Je suggère que Qui vous êtes vraiment, vraiment, est libre de tout stress parce qu’il n’y a là aucune chose qui puisse être stressée. Cette transparence éveillée, immense, est absence de chose et par conséquent instressable. Les problèmes peuvent donc être une aide.

Je trouve qu’il est très réconfortant et très utile de fréquenter des gens branchés sur cette longueur d’ondes. Je reste avec Chris, Carol et d’autres amis que j’ai connus en Australie. Ils me revigorent et m’aident à rester clair. Je dirais que voir Qui vous êtes vraiment, vraiment, est contagieux comme la rougeole. Alors restez avec des gens branchés sur cette longueur d’onde. Vous me direz que vous ne connaissez personne de branché. Alors montrez aux autres qui ils sont. Vous pourriez ce soir, en quittant cet endroit, le montrer à une douzaine de personnes. Chris m’a dit qu’à son retour d’Adélaïde par avion, il l’a partagé d’aventure avec le passager assis à côté de lui. C’est tout à fait partageable. En fait, c’est la seule chose que vous pouvez partager avec les gens. Je veux dire que si j’essaie de partager avec vous mon appréciation de Mozart ou le ravissement que me procurent les couleurs fantastiques des fleurs australiennes, votre rouge sera peut-être mon bleu ; et Mozart ! comment pourrais-je partager ce que je ressens en écoutant Mozart ? Ou n’importe quelle autre expérience ? C’est pratiquement incommunicable. Mais lorsque vous voyez Qui vous êtes vraiment, vraiment et que vous le partagez avec quelqu’un au moyen de ces expériences ou d’autres, les barrières tombent. Elles tombent vraiment. Vous pouvez partir d’ici et le montrer aux gens. Je vous demanderai même de le faire pour moi. Le ferez-vous, s’il vous plaît ? Le monde n’a-t-il pas besoin de cette recette d’amour ? Dire la vérité, c’est vivre dans un monde où l’amour est possible. Nous avons besoin de cela. Mettre ceci en pratique est amusant, énergisant, efficace, mais c’est aussi désespérément nécessaire.

Ne croyez pas un mot de ce que dit Douglas, testez-le. Vous êtes votre propre autorité. Si vous trouvez quelque chose de tout à fait différent là où vous êtes, je le respecte. Je ne suis pas en train de parler de 'La Voie’ vers Qui vous êtes vraiment, vraiment. Je parle d’une voie. C’est une très bonne voie, démythifiée, moderne, efficace, pour rentrer Chez Soi à l’endroit que nous n’avons jamais quitté, une voie parmi beaucoup autres. Mais c’est une voie pour notre temps et elle est exceptionnellement partageable.

Demain, nous confirmerons cela avec d’autres expériences beaucoup plus élaborées. Elles ne seront pas nouvelles pour vous, car vous avez déjà vu. Tout le monde a vu ce soir, mais nous explorerons comment vivre cela, l’intégrer dans notre vie. Vous serez donc très bienvenus demain et le jour suivant, mais ce n’est pas indispensable, pas absolument.

J’aimerais juste vous dire mon amour et vous remercier de votre présence ce soir. Magnifique...

 


© Douglas Harding 1991
traduction française : Alain Maroger et Catherine Harding
avec les voix d’Alain Maroger et José Leroy
adaptation française :
pour tout renseignement :
InnerQuest
BP 29
75860 Paris cedex 18 France
tél/Fax : 01 42 58 79 82
e-mail: innerquest@free.fr

bottom of page